Planète-déchet

 
 

La chasse à courre                       

          
         Un équipage en forêt : élégamment vêtus, un groupe de cavaliers accompagné de plusieurs dizaines de chiens parcourt la forêt. Ils sont suivis de près par plusieurs dizaines de personnes, à vélo, en voiture ou même à pied, heureux – ou fiers ? – d’être là, eux aussi… Sur fond de cor de chasse et dans une ambiance joviale, voire festive, ils cherchent. Ils guettent. Puis tout se précipite. L’objet de leur convoitise vient d’être localisé. L’équipage est lancé à vive allure derrière la meute hurlante. 
       
       Devant eux, un animal. Cerf, chevreuil, sanglier, qu’importe. Qu’importe même son âge, ou son état. Ce soir  il sera mort. Mais pour l’instant, il fuit. Il tente une course désespérée devant les chiens, motivés à coups de fouet pour atteindre leur but. Comment qualifier ceux qui vont se réjouir de voir les chiens commencer à dévorer vivante la « proie » ? Comment nommer ceux qui vont poser devant l’animal tout juste tué ou plutôt, pour reprendre leur jargon, tout juste « servi »?


 




Approximations de Rigueur
 
             Concernant d’abord la période de chasse, la saison officielle de chasse à courre au chevreuil, au cerf et au sanglier débute le 15 septembre pour se clôturer le 31 mars. Cependant, en dehors de cette période, il est possible de faire des chasses d’entraînement dans les parcs privés… Elles sont en général organisées en août et au début du mois de septembre et dépendent notamment des structures disponibles. Mais certains équipages profitent également des parcs privés pour continuer à chasser jusqu’en avril… voire même toute l’année dans certains gros parcs privés et clos.
 
             Les équipages de chasse à courre sont très loin de faire l’unanimité. Ainsi, des propriétaires de plus en plus nombreux n’autorisent pas ou plus le passage d’une chasse chez eux. Certains sont simplement opposés à la chasse à courre, tandis que pour d’autres, l’interdiction fait suite à des abus tels que le non respect des plantations. D’autres encore sont des chasseurs à tir qui ne veulent pas que la totalité du gibier soit dérangée. Les équipages sont donc de plus en plus confrontés au problème des propriétés privées qui les obligent bien souvent à arrêter une chasse…
 
De la noblesse...
 
 
              En totale contradiction avec l’essence même de la chasse à courre, l’agrainage des animaux s’avère pourtant être une pratique courante. Il s’agit de nourrir le gibier pour le garder sur une parcelle. Ainsi, lorsqu’une chasse doit avoir lieu, l’équipage est certain d’y lever un animal s’il n’en trouve pas ailleurs.
 
             Comme pour la chasse à tir, en début de saison, un certain nombre de bracelets est accordé aux équipages qui correspond au nombre de captures autorisées. Ce nombre est fixé en fonction du cheptel. Mais lorsque tous les bracelets ont été utilisés avant la fin de saison, la chasse ne s’arrête pas pour autant… Il arrive qu’un ou plusieurs bracelets supplémentaires soient accordés par les autorités. Il arrive aussi, que par un arrangement avec certains propriétaires privés, certains chasseurs et certains voisins de la forêt domaniale, des bracelets supplémentaires soient récupérés.

                  Cependant, la pratique la plus contestable est sans nul doute la « curée chaude ». Elle n’est possible que lors de la chasse au chevreuil car cerfs et sangliers sont trop gros. Il suffit dans ce cas au Maître d’équipage de laisser les chiens dévorer l’animal et de dire qu’il a été perdu, ou bien simplement de faire croire qu’il n’est pas arrivé à temps pour empêcher les chiens de le dévorer… De cette manière, et si aucun agent de la chasse n’est présent ce jour-là, le bracelet reste disponible.

 
 

Chiens et chevaux
 
                 
             La vie des chiens utilisés en chasse à courre est loin d’être idyllique. Depuis leur quotidien jusqu’aux actions de chasse, jamais ils ne savourent le bonheur d’être chiens… La taille des meutes est extrêmement variable. Elle dépend de celle des équipages et de l’espèce chassée, et peut ainsi compter de 20 à 500 chiens ! En dehors de la saison de chasse, seuls certains équipages ont la possibilité de les « sortir ». Cela permet pourtant de les garder dans une forme relative. La plupart des chiens reste enfermée dans le chenil jusqu’à ce que la chasse reprenne, soit pendant près de 5 mois… Leur qualité de vie y est extrêmement variable : certains chenils sont complètement bétonnés ou disposent d’un simple enclos avec de la terre au sol. D’autres chenils ont par contre de vastes parcs avec de la végétation auxquels les chiens peuvent accéder librement.


 
 
                 
               Durant la chasse, le sort des chiens est en revanche toujours identique. Si les responsables d’équipage montrent d’une manière presque exagérée l’amour qu’ils ont pour leurs chiens avant la chasse, à grand renfort de petits noms et avec même quelques caresses, toute trace d’affection disparaît immédiatement lorsqu’elle démarre ! Dès lors, si jamais un chien ne répond pas à un ordre rapidement, le ton monte très vite et le fouet claque facilement…  Et quand arrive la fin de la chasse, ils sont rarement chargés avec douceur dans les véhicules, mains et pieds intervenant de multiples façons ! Il faut dire qu’à l’issue des dizaines de kilomètres parcourus sans répit, les chiens sont littéralement épuisés…
 
                   Pour constituer les meutes les plus efficaces, la sélection est drastique. Dans beaucoup d’équipages, l’euthanasie reste toutefois largement utilisée pour se débarrasser de ceux qui sont inaptes à la chasse – du fait de leur âge ou de leurs capacités – mais aussi pour réduire une meute devenue trop importante ! D’une façon ou d’une autre, les chasseurs se débarrassent des chiens qui ne leur servent plus à rien. Inversement, il arrive que des chiens d’un âge assez avancé (plus de 12 ans) ou porteurs d’une maladie (une chienne avec une grosse tumeur a été observée) soient encore utilisés s’ils sont vraiment très doués…


 


 
                  Le sort des chevaux utilisés en chasse à courre n’est guère plus enviable que celui des chiens. Ils n’ont que rarement droit aux égards dont ils auraient besoin. Testés, usés, jetés, pour eux qui ont parfois déjà un lourd passé, le passage dans le monde de la chasse n’est pas de tout repos.
 
                  L’avenir des chevaux qui ne trouvent pas de propriétaire définitif est sans surprise, pour eux ce sera l’abattoir. Le destin d’un cheval d’équipage, quelle qu’ait été la durée du service rendu, n’est guère plus plaisant. Dès qu’il n’est plus capable de chasser, à cause de son âge ou d’une blessure, sa destination est la même.
 
                    Pour les cavaliers qui n’ont pas les moyens ou le désir d’être propriétaire, il est possible de louer un cheval par le même intermédiaire, le temps d’une chasse. Ces chevaux ont une existence encore plus difficile. Ils changent continuellement de cavaliers. Ces derniers n’ont pour eux aucun égard. Ils ont juste besoin que leur monture tienne quelques heures… Et bien sûr, dès qu’ils ne sont plus utilisables, le maquignon les envoie à l’abattoir… Car un cheval de chasse à courre peut s’user très vite. Lors d’une chasse, il doit être en mesure de faire jusqu’à 50 km, quels que soient le temps et le relief. Il faudrait donc, pour être bien préparé, qu’il soit sorti tous les jours pour une promenade au pas de 5 à 6 km, ou bien au moins quelques heures au paddock. Pourtant, la plupart des chevaux ne bénéficient d’aucune préparation avant la chasse et passent leur temps au pré ou en box… Ils n’ont souvent le droit à aucun entraînement, pas même à la réouverture de la chasse, alors qu’ils sont au pré depuis plusieurs mois…
 
Les animaux chassés
 
               En France : Environ 3 800 animaux sont tués chaque année par près de 400 équipages de chasse à courre. Parmi eux : 37 équipages chassent le cerf, 93 chassent le chevreuil, 42 le sanglier, 44 le renard, 130 le lièvre, et 47 le lapin.
 
               La souffrance des animaux chassés à courre n’est pas anecdotique. Elle représente à elle seule une raison valable d’interdire cette pratique, comme cela a déjà été le cas au Royaume-Uni. Les cerfs, comme les renards et les sangliers présentent en effet des comportements complexes, un système surrénal très développé et une remarquable faculté à détecter les prédateurs. La commission d’enquête créée par le gouvernement britannique a d’ailleurs conclu à propos de la chasse à courre qu’elle « compromet gravement le bien-être » des cervidés, des renards et des sangliers.


 
 
               
                   Chez les chevreuils, le mâle est nommé brocard et la femelle est nommée chevrette. Leurs petits sont des faons jusqu’à 6 mois, puis des chevrillards jusqu’à un an. Durant toute cette première année de vie, ils restent aux côtés de leur mère. Les animaux sont chassés indépendamment de leur âge. Même les faons ne bénéficient d’absolument aucune magnanimité… Les naissances ayant lieu début mai, en début desaison de chasse et au moins jusqu’en octobre,les jeunes sont des faons. Mais les chasseurs parlent toujours de chevrillards, à la fois entre eux et sur leurs rapports… Alors tentative pour se donner bonne conscience ? Dans tous les cas, tuer un bébé animal encore dépendant de sa mère n’a rien de glorieux…
 
                
                 La chasse au cerf n’est pourtant pas plus morale. Les cerfs sont d’ailleurs chassés lors de la période du brame par certains équipages, malgré qu’ils soient à la fois perturbés et fatigués durant cette période… La chasse à courre du cerf a une particularité: elle se termine 9 fois sur 10 dans l’eau (le bat l’eau). Les chasseurs sont donc toujours équipés d’une barque… Dès lors, l’animal finit bien souvent noyé après avoir été attrapé par la queue et avoir reçu le coup de grâce.


 

 
                    La chasse à courre des cerfs est une pratique d’une grande cruauté : incapable de gracier un animal qui le mérite, incapable de retenir les chiens de le dévorer et de lui offrir une mort rapide à l’issue de sa course… L’agonie des cerfs est longue. Les voir chercher refuge auprès d’une harde de biches – peut-être celle où se trouve leur mère ? – est douloureux. Lire l’affolement dans leurs yeux quand ils se jettent à l’eau ou quand ils sentent les chiens trop près est bouleversant.



 
 
                   

                    À la différence de la chasse au cerf et au chevreuil, lors de la chasse à courre au sanglier, la meute complète n’est pas immédiatement lâchée. Seuls quelques chiens, appelés « rapprocheurs », sont utilisés dans un premier temps. Le rôle de ces chiens est de localiser un groupe d’animaux et d’en isoler celui qui sera chassé. On ne lâche qu’ensuite le reste de la meute pour le poursuivre.


 

 

                    Ce sont en général les chiens qui choisissent la victime. Il arrive donc régulièrement de revenir au point de départ, une fois constaté que l’animal isolé est de trop petite taille… Un jeune animal, ne faisant que quelques dizaines de livres, n’est guère « intéressant » à poursuivre, d’après les chasseurs ! En revanche, si un individu particulièrement imposant est repéré, tout sera fait pour que ce soit lui qui soit chassé. Le cas échéant, tous les animaux sont chassés.
 

 


Source : Rapport One Voice

 

 

 





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